Cela fait
maintenant 5 semaines que nous sommes en confinement à la maison et cela fait 5
semaines aussi que j’ai envie d’écrire. J’ai plusieurs sujets à relater mais
aussi hallucinant que ça puisse l’être, je ne trouve pas le temps de le faire.
Je sais qu’en ce moment nous ne pouvons pas sortir de la maison, que le temps
c’est tout ce que nous avons mais avec les activités à faire, les cours de
sport à ne pas manquer, les repas à préparer, les challenges à relever, un mari
à occuper, 2 enfants à gérer et l’école à la maison le temps passe vite et les
journées deviennent trop courtes. En plus je consacre un peu de temps
l’après-midi pour prendre des nouvelles à tour de rôle de mes copines
éparpillées dans le monde, dans des pays différents avec un niveau d’épidémie
diffèrent.
Quand la
situation a commencé à changer au Maroc et quand on a eu vent d’un probable
état d’urgence et d’un confinement obligatoire, les gens se sont rués dans les
supermarchés pour faire des stocks de nourriture. Ce qui fait que J’ai reçu 3
appels d’amis différents me demandant conseil sur le stock à faire, un exemple
de produits à acheter et des conseils pour bien préparer les réserves. J’ai été
la personne leur venant à l’esprit car je rempli la catégorie « a déjà
vécu une guerre » en tant que libanaise d’origine, je suis parmi les rares
dans leur entourage et notre génération à avoir vécu un confinement avant. Mes
enfants, qui ont entendu mes conversations téléphoniques, ont commencé à me
questionné eux aussi sur mes récits de guerre.
L’idée de la
guerre est venue à l’esprit des gens quand notre cher chef de l’Etat, Emanuel
Macron, a comparé la situation liée au Coronavirus à un état de guerre lors de
son allocution du 12 Mars 2020 concernant la crise sanitaire du moment. A
six reprises, sur un ton martial visant à mobiliser contre un « ennemi
invisible » le chef de l’Etat a répété : « nous sommes en guerre ».
Une anaphore que je juge bien alarmiste, dangereuse et sème la panique.
Si pour
certaines personnes ayant vécues la deuxième guerre mondiale en France en 1939,
il peut y avoir une similitude et que le comparatif peut être juste, je peux
comprendre qu’ils font allusion à la peur vis-à-vis des gaz, des armes chimiques
et biologiques.
Mais pour moi,
ayant vécu pendant mon enfance plusieurs guerres au Liban, j'ai une idée bien précise de cette dernière. La guerre c’est la
lutte armée entre états, c’est un conflit armé entre deux milices au sein d’un même
état, c’est une guerre civile, une guerre de sécession ou une guerre révolutionnaire.
La guerre c’est une forme de violence, c’est les bombes qui anéantissent les
villes et tuent des militaires mais aussi des innocents, des femmes et des
enfants.
La guerre c’est
la peur quand retentissent les sirènes, la course pour se mettre à l’abri, l’expérience
du déracinement, du combat pour la survie, la hantise d’être déchiqueté, voire réduit
à néant par des bombes d’une puissance sans cesse renouvelée, l’attente de la
mort a l’approche des assauts et une forme d’épuisement mental et physique.
La guerre c’est
la famine, les tickets de rationnement, la pénurie des denrées alimentaires et la
dégradation des conditions d’existence.
La guerre c’est
surtout notre sentiment d’impuissance contre cet ennemi qui réduira sous nos
yeux nos êtres aimés en cendre, coupés en morceaux ou tués dans d’atroces et
odieuses conditions, de barbarie, le sentiment que le ciel nous tombe sur la tête.
C’est vrai que
je ne suis pas à mon premier confinement, j’ai vécu différents types de
confinement au fil des guerres, et c’était bien pire. Le risque de sortir de l’abri
à l’époque ne consistait pas à avoir une amende mais à se faire tirer dessus.
Je préfère le confinement d’aujourd’hui, en sécurité
tant que je reste à la maison, entourée de ma petite famille, le reste de ma
famille et mes amis sont à une distance d’un whatsapp call. Je sais que le ciel
ne me tombera pas dessus quand je sors sur ma terrasse, le toit de la maison ne
s’effondrera pas à n’importe quel moment et la mort ne me menace pas tant
que je suis en confinement.
Alors je considère
que ce que nous vivons aujourd’hui est une grave crise sanitaire, une pandémie,
avec des dirigeants qui la gèrent plus ou moins bien selon les pays, nous
sommes en lutte contre une maladie qui se propage dangereusement. Nous sommes
en lutte contre un virus qui ne se propage pas en raison du feu de ses blindes,
de la puissance de son aviation ou de l’habilite de ses généraux mais en raison
des mesures inappropriés, insuffisante ou trop laxistes prises par les pouvoirs
publiques et chacun de nous.
Mais fort
heureusement nous ne sommes pas en GUERRE. Rester confiné chez soi sur le canapé
n’est pas un état de guerre non plus.