lundi 11 mars 2019

A comme .....


J’adore les soirées déguisées, l’effort mis dans la préparation des costumes et l’imagination débordante  des invités. J’ai étais à plusieurs soirées déguisées et j’ai organisé quelques-unes. A chaque fois, il y a eu d’agréables surprises, des rencontres plus ou moins violentes et des émotions soudaines qui nous  frappent dans la sensibilité et le psychisme. Des délires qui font qu’on en parle jusqu’à ce jour, à chaque fois qu’on évoque nos souvenirs ou à la veille des préparatifs d’une autre soirée.

Nous ne pouvons pas nous empêcher de rigoler mais tirer aussi notre révérence à l’imagination exponentielle d’un ami qui s’est déguisé en carambar pour une soirée sous le thème de « tout ce que tu as voulu être » car apparemment il a toujours rêvé qu’on le suce (désolée pour les très pudiques qui lisent cet article) ou comme l’amie vêtue d’une élégante petite robe noire à la française mais qui a collé de la fourrure sous les aisselles en guise de cheveux longs non épilés pour la soirée « tenue chic, détail choc » et qui lui a permis de gagner le trophée du meilleur déguisement lors de cette même soirée.
Tout  simplement, les déguisements nous offrent la possibilité de s’évader, le temps d’une soirée, dans un monde irréel et de partager avec des proches des moments ou l’imaginaire et la dérision prennent d’emblée toute leur place.
La dérision et le délire c’est aussi quand nous préparons un déguisement pour une soirée ou quand nous essayons d’en trouver un qui correspond au thème imposé. Je me souviens des fous rires que nous avons eu avec mes collègues à l’agence d’architecture quand j’avais imposé le thème « S comme.. » pour ma fête d’anniversaire. Les convives devaient venir déguiser en quelque chose qui commence par un S. Les pauses déjeuner se sont transformées en déluge d’idées astronomiques sur l’aberration de l’imagination des architectes. A la soirée j’ai vu défilé des sapeurs-pompiers, des Soldats, des superman, des secrétaires mais la surprise était surtout le collègue tout en blanc vêtu avec un bonnet de bains en latex sur la tête en guise de suppositoire.

Dans le cadre de ces soirées déguisées, toute notion d’interdit, de contrainte et de supériorité sociale s’efface au profit de la convivialité et de l’autodérision. Les déguisements ont des fonctions symboliques très fortes qui permettent de s’approprier un personnage et d’échapper à la réalité
Depuis la nuit des temps, l’homme, l’adulte, tout autant que l’enfant, se déguisent. Les psychanalystes l’ont souligné depuis bien longtemps : « l’homme n’est jamais lui-même, en toutes circonstances, la société et l’environnement dans lequel il évolue l’obligent en permanence à porter un masque, à refouler ses pulsions ».

Idem pour le monde du travail, le métier que nous choisissons si ça rentre dans le cadre de notre passion définit qui nous sommes et non pas un rôle que nous jouons ni un déguisement que nous enfilons pendant la journée. Si on choisit de faire de notre passion notre métier ça devient une source d’épanouissement, de satisfaction, une réalité, des envies, un savoir-faire, une personnalité.  Le travail et le bonheur deviennent des lors compatibles.
Celui qui travaille sans passion accomplit son labeur par obligation, volonté et devoir, alors que le passionné oublie qu’il doit travailler.

Pour moi, nul besoin de déguisement, nul besoin de porter un masque, nul besoin de subir des contraintes. L’architecture m’attire comme la pratique d’un jeu, ou le plaisir allège le poids des contraintes et arrête le défilement du temps. L’architecture me correspond, elle est alignée avec mon talent naturel, mon potentiel, elle m’offre des champs à explorer, nourrit ma soif de connaitre, de comprendre, de réaliser, d’imaginer, d’assembler, de combiner les normes et dérober aux règles.

Au-delà du mélange de couleurs et de volumes, ce savoir-faire ancestral habille l’espace d’impressions et d’intentions fortes, installe dans les trames des fibres l’accident ou l’aléatoire qui offre le supplément d’âme et d’esprit.
Les longues années d’études ont largement rendu compte de la créativité foisonnante de ce savoir-faire ancestral, intellectuel, relationnel et artistique.

Je peux parler des heures sur le fait de se déguiser au travail, se déguiser la journée en enfilant un métier qui n'est pas le leur mais je peux aussi parler des jours de se déguiser dans la vie vu le nombre de personnes  avec un double visage que j'ai rencontré dans ma vie.

Je termine avec cette citation de Madame de Sablé " Si l'on avait autant de soin d’être ce qu'on doit être que de tromper les autres en déguisant ce que l'on est, on pourrait se montrer tel qu'on est, sans avoir la peine de se déguiser"